L'Oeuvre
de Cagliostro
Pour mieux connaître Cagliostro, il eut fallu retrouver
et étudier ses œuvres.
Les écrits qu’il a laissés sont très rarement de
sa main. Il dicte ou suggère au disciple qui lui sert
temporairement de secrétaire, ce qu’il convient d’écrire
en son nom.
On attribue à Cagliostro, en dehors du Rituel et
des Règlements de la maçonnerie égyptienne, un certain
nombre d’ouvrages tels que De la vision béatifique,
De l’évocation des Esprits supérieurs, La Régénération
physique et morale, L’Art de faire de l’or, La Kabbale
divine, Le calcul astrologique.
D’autre part, l’auteur du manuscrit de La Très Sainte
Trinosophie, trouvé dans ses papiers au château Saint-Ange
par les soldats du maréchal franc-maçon Masséna (qui
ignorait la mort du Grand Cophte et espérait le libérer),
est bien Cagliostro.
Le symbolisme de l’ouvrage est égyptien selon la
mode de l’époque et la coutume du Grand Cophte, titre
que Cagliostro s’était donné en tant que fondateur de
son Rite.
Ce document apporte un précieux témoignage… De son
propre aveu, Cagliostro n’avait pas encore pu rejeter
certains dangers de l’orgueil…
« O mon fils, ne suivez pas mes travers, qu’un vain
désir de briller aux yeux du monde ne cause pas votre
perte… pensez à moi, pensez que c’est dans un cachot,
le corps brisé par les tortures, que votre ami vous
écrit… Dieu m’a puni, mais qu’ai-je fait aux hommes
cruels qui me persécutent ? Quel droit ont-ils pour
interroger le ministre de l’Eternel ? Ils me demandent
quelles sont les preuves de ma mission. Mes témoins
sont des prodiges, mes défenseurs mes vertus, une vie
intacte, un cœur pur. Que dis-je, ai-je encore le droit
de me plaindre ? J’ai parlé, le Très-Haut m’a livré
sans force et sans puissance aux fureurs de l’avare
fanatisme. Le bras, qui jadis pouvait renverser une
armée, peut à peine aujourd’hui soulever les chaînes
qui l’appesantissent
Je m’égare, je dois rendre grâce à l’éternelle justice…
Le Dieu vengeur a pardonné à son enfant repentant. Un
esprit aérien a franchi les murs qui me séparent du
monde resplendissant de lumière, il s’est présenté devant
moi, il a fixé le terme de ma captivité. Dans deux ans
mes malheurs finiront, mes bourreaux en entrant dans
mon cachot le trouveront désert et bientôt, porté par
les quatre éléments, pur comme le génie du feu, je reprendrai
le rang glorieux où la bonté divine m’a élevé... Mais
combien ce terme est encore éloigné, combien deux années
paraissent longues à celui qui les passe dans les souffrances,
dans les humiliations. Non contents de me faire souffrir
les supplices les plus horribles, mes persécuteurs ont
employé pour me tourmenter des moyens plus odieux encore,
ils ont appelé l’infamie sur ma tête, ils ont fait de
mon nom un objet d’opprobre. Les enfants des hommes
reculent avec effroi quand le hasard les fait approcher
des murs de ma prison, ils craignent qu’une vapeur mortelle
s’échappe par l’ouverture étroite qui laisse passer,
comme à regret, un rayon de lumière dans mon cachot.
»
Cagliostro n’avait jamais pu vaincre entièrement
certaines tendances de caractère que traduisent les
traits jupitériens de son masque fixés par le ciseau
de Houdon. Son ami, le pasteur franc-maçon suisse Jean
Gaspard Lavater, dont il voulait traduire en français
le Traité de Physiognomonie aurait pu y découvrir la
superbe générosité d’un Oriental tout aussi bien que
le caractère Sicilien.
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